C’est à l’occasion d’un volontariat avec Worldpackers que j’ai découvert le projet Pé da Pedra. En passant deux semaines là-bas, j’ai pu découvrir les principes de l’écoconstruction en mettant la main à la pâte!
Le Pé da Pedra, qui signifie Au pied de la pierre c’est le nom du nid qu’ont fondé Laura et Jacques. C’est à la fois leur maison, et leur projet. L’objectif est d’être plus autosuffisant, et d’offrir des formations sur l’écoconstruction de maison en terre et la permaculture. De plus, certaines constructions seront destinées à être louer aux touristes.
Les installations écologiques déjà en place
Potager
Dans l’idée de créer un jardin potager selon les principes de la permaculture, des arbres frutifères ainsi que de nombreux légumes et herbes aromatiques ont été plantés : mûres, fruits de la passion, bananes, pitayas (fruits du dragon), papayes, goyaves, ananas, courgettes, poivrons, physalis, tomates, salades, choux divers, menthe, mélisse officinale, groseiller des Barbades (ora-pro-nobis), moutarde… L’ensemble forme un écosystème équilibré, qui résiste mieux aux maladies et aux nuisibles qu’un système peu diversifié. En effet, la diversité plantée favorise la biodiversité, et attire des auxiliaires bénéfiques. De plus, cela permet de cueillir différents fruits et légumes toute l’année.
Piscine naturelle
La famille a construit une piscine naturelle délimitée par des pierres récupérées sur leur terrain. L’eau provient de la source et il y a un circuit de récupération d’eau qui permet la filtration et le retour de l’eau dans le bassin.
Compost
La famille trie les déchets organiques en cuisine et les traite avec leur compost en bac. Il est donc alimenté quotidiennement, et la matière organique est toujours recouverte de matière sèche afin d’équilibrer l’apport en carbone et l’apport en azote.
Vaches
Deux vaches pâturent une partie de la propriété. La traite est réalisée par le voisin qui a une dizaines de vaches. Avec ces deux vaches, plus de 8L de lait sont récupérés chaque jour pour la famille et les voisins, sachant qu’une bonne partie du lait est laissée pour le veau de chaque vache. Ce lait permet à la famille de récupérer du lait mais aussi du yaourt et du fromage frais fabriqué par la voisine.
Traitement des eaux grises par un circuit de bananiers
Le traitement des eaux grises (eau de la cuisine, douche, machine à laver…) est réalisé par un circuit de bananiers.
Ce système est une solution écologique, simple et peu coûteuse au problème majeur de l’assainissement rural, puisque en effet la plupart des fosses utilisées en milieu rural au Brésil sont rudimentaires ou inexistantes, et donc induit la pollution des cours d’eau à proximité.
Le système consiste en un trou circulaire recouvert de paille, de petites branches, de feuilles et d’autres débris végétaux. Autour, des bananiers sont plantés. Ceux-ci ont une forte demande en eau puisqu’ils évaporent plusieurs litres d’eau chaque jour, ce qui permet d’évacuer l’eau du sol et d’éviter l’accumulation d’humidité dans le fossé. Les eaux grises sont acheminées jusqu’à la fosse par un tuyau.
Avantages: installation et entretien simple, traitement des eaux usées localement, contribue à la production d’aliments (bananes).
Construction de maison avec la technique du pau-a-pique
La technique du pau-a-pique (torchis posé sur clayonnage en français) est une technique de construction brésilienne qui remonte à la période coloniale. Elle consiste à entrelacer de poutres verticales fixées au sol avec des poutres horizontales, généralement en bambou, reliées entre elles par des lianes, donnant naissance à un grand panneau perforé qui, après avoir été comblé avec un mélange d’argile et de paille, devient un mur. Cette technique était populaire principalement dans les régions rurales du Brésil qui présentent naturellement les matériaux naturels nécessaires. Elle permettait alors la construction à bas coût.
Traditionnellement, la construction des maisons pau-a-pique est faite collectivement avec la communauté. Tout le monde participe à la préparation de l’argile, la collecte de la paille et l’assemblage de la structure en bois…aussi bien les hommes que les femmes et les enfants. Ainsi le processus de construction avec la technique du pau-a-pique renforce les liens communautaires et assure la préservation de cette technique de construction au fil des siècles.
Les avantages de la technique
- Confort thermique: circulation de l’air optimale et absorption de la chaleur.
- Durabilité: cette technique utilise des matériaux naturels et les constructions qui en résultent durent des dizaines d’années voire des siècles si bien entretenus.
- Bas coût: les matériaux naturels présents sur place ne coûtent rien, et traditionnellement la main-d’oeuvre est la communauté.
- Renforce les liens de la communauté locale
- Esthétique: les constructions en pau-a-pique sont esthétiquement authentiques et charmantes.
La mini-interview : Jacques nous parle du projet !
Comment le projet a commencé? Pourquoi avoir déménager à la campagne?
« J’ai toujours voulu vivre à la campagne. Quand j’ai rencontré Laura, elle aussi souhaitait vivre dans une ville plus petite et reprendre ses études. Travaillant à la Copasa (Compagnie d’assainissement du Minas Gerais) à l’époque, je me suis renseigné sur la disponibilité de poste le sud du Minas Gerais. Il y avait un poste à Itajubá, or c’est aussi là qu’il y a la meilleur faculté fédérale pour le cursus d’ingénieur en génie électrique. On a donc décidé de déménager à Itajubá et Laura a repris les études pour faire un doctorat. A l’époque, on voulait une vie plus tranquille, ça faisait déjà depuis 2010 aue je ne vivais plus en ville puisque j’avais déménager dans la Serra da Moeda. »
Comment avez vous êtes vous formés concernant la permaculture et l’éco-construction?
« On a commencé avec Internet, on a suivi une formation de l’Institut Pindorama, qui traite de la permaculture de façon générale. Elle est divisée en plusieurs parties thématiques. On a suivi environ 70% de la formation. Pour l’éco-construction, on a utilisé l’expérience qu’on avait en tant qu’ingénieurs, puis on a acheté des livres et des formations en ligne. Mais c’est sûr que nos expériences professionnelles nous ont beaucoup aidées, on a seulement dû changer de vision en relation aux matériaux utilisés afin d’utiliser les matériaux plus durables et disponibles autour de nous. »
Quels ont été vos financements ?
« En réalité, on a pas eu d’aides monétaires pour le financement du projet. Par contre on a eu l’aide de la communauté en ce qui concerne les matériaux et la main-d’oeuvre. Nous avons aussi reçu l’aide de Emater (Société d’assistance technique et d’extension rurale de l’État de Minas Gerais) et du SENAR MINAS (Service national d’apprentissage rural – Administration régionale de Minas Gerais) qui nous a soutenu en nous proposant 2 formations réalisées ici au Pé da Pedra. On a clôturé le terrain oú se trouvent les sources d’eau et on a reforesté en plantant 2000 semis, chose aue l’on va réiterer lors de la saison des pluies. »
Quelles sont les difficultés que vous avez rencontrées ?
« Le plus dur ça a été l’époque ou je travaillais en dehors de la ville, car je passais la semaine la-bas et donc je n’avais aue le week-end pour travailler sur le projet en plus de profiter de la famille dont je ressentais le manque toute la semaine. C’était terrible et ça a impacté ma santé mentale. J’ai donc pris la décision de quitter l’entreprise pour rester 100% du temps au Pé da Pedra afin de réaliser notre projet. »
Conclusion : Après ces 10 ans passés à la campagne, retourneriez-vous vivre en ville ?
« Pour rien au monde je ne retournerais vivre en ville, à moins qu’il y ai quelque chose de grave qui m’y oblige. Donc non, retourner en vivre en ville, ce n’est pas dans nos plans. »
Avez-vous des regrets, des choses que vous auriez fait différemment ?
« Je n’ai pas pour habitude de regretter les choses que j’ai faites. Je regrette plutôt ce que je n’ai pas fait ! »
Dans ma peau de volontaire
Au Pé da Pedra, la journée ne commence qu’après un bon petit-déjeuner renforcé. Chaque jour, les tâches sont différentes et chacun contribue avec les compétences qu’il a ou celles qu’il veut développer. Je présente ici quelques tâches que j’ai pu réalisé durant mon volontariat:
Traitement des bambous par le feu
Dans l’objectif de construire un étendoir à linge ainsi qu’un faux plafond avec des bambous, nous les avons brûler à l’aide d’un gros chalumeau. Ce procédé rend le bambou moins attrayant pour les insectes et plus résistant à l’eau et à l’humidité. De plus, il améliore l’aspect visuel puisque après traitement le bambou est plus sombre et a une texture agréable comme-ci un vernis avait été appliqué.
Faux plafond en bambou
Nous avons fixés des les pailles de bambous à l’aide de demi-bambous précedemment traités par pyrolise.
Fabrication d’un étendoir à linge
Nous avons fait un étendoir à linge de plafond coulissant à l’aide de bambous et de cordes fixées sur les poutres déjà présentes. Une corde a été placée juste au dessous de chaque bambou pour éviter que les vêtements ne s’envole en cas de vent.
Mur em pau a pique
Nous avons placé les bambous verticaux espacés d’environ trente centimètres, stabilisés par des clous placés en haut et en bas du mur. Ensuite, les bambous horizontaux ont été accrochés aux bamboux verticaux à l’aide du cipó qui forme une liane, résistante à la torsion.
Pour le remplissage du mur, des membres de la communauté sont venus en renfort. Nous avons utilisé de la terre argileuse présente sur le site. Nous avons formé des petits tas de terre sur des bâches (3-5 brouettes de terre par tas). Ensuite, de l’eau a été ajoutée dans chaque tas jusqu’à obtenir de un mélange malléable.
La paille a été incorporée en piétinant directement dans la terre mouillée. Puis nous avons rempli le mur avec cette terre. A la fin, il est important de lisser le mur afin qu’il soit droit.
Plusieurs jours sont nécessaires au séchage du mur. Les prochaines étapes sont de passer l’enduit puis la peinture naturelle.
Utilisation d’un déshydrateur alimentaire solaire
Nous avons pû déshydrater des bananes grâce au déshydrateur solaire construit par Jacques. Il consiste en une boite vitrée en bois avec des aérations faisant circuler l’air.
Traire une vache!!
Boire du lait cru présente des risques mais c’est quand même bien bon haha 🙂
En conclusion, j’ai beaucoup appris pendant ces 2 semaines de volontariat au Pé da Pedra. Cela m’a donné envie de découvrir les autres techniques d’écoconstruction.
Ressources:
https://pt.wikipedia.org/wiki/Pau_a_pique
https://pt.linkedin.com/pulse/casa-de-pau-pique-uma-jornada-pela-arquitetura-antonio-ventura